On va se dire les vraies affaires : souffrir d’anxiété et aimer le bon vin, ce n’est pas une mince affaire. Non pas parce que l’anxiété et le vin ne font pas bon ménage, non, parce qu’on n’est pas toujours certain que le vin va être bon.
LA PETITE ROBE NOIRE
Slow living, minimalisme, consommation consciente, ces concepts virevoltent dans mon esprit d’autant plus qu’en cette époque de l’année, les cartes de crédit se font tellement aller que ça sent le plastique brûlé sur les artères commerciales. À moins que ça ne soit les pneus de voiture des livreurs d’Amazon qui font de leur mieux pour distribuer des colis à tous les enfants du monde avant le coup de minuit ?
Bref, je pense à la surconsommation et j’angoisse profondément. Même que j’ai konmari certaines sphères de ma vie. Ma garde-robe, par exemple, ne compte plus que quelques items choisis, simples, confortables et faciles à agencer. J’ai « Kijiji » la plupart des babioles du sous-sol. À Noël, les enfants ne recevront que quatre présents chacun : quelque chose qu’ils désirent, quelque chose dont ils ont besoin, un vêtement et un livre. Plate de même.
Et puis, fini les cadeaux d’hôte inutiles : la chandelle au sapin cancérigène, le poinsettia qui sera assassiné par noyade dans quelques semaines à peine ou l’inexcusable assiette de service de fromages abominablement laide. Je cherche désormais à offrir à ceux que j’aime quelque chose de vraiment utile et de qualité, qui apportera du bonheur.
Je ne vois qu’un seul objet capable de remplir toutes ces fonctions à la fois : des bulles. Encore faut-il qu’elles soient bonnes, me direz-vous. Oui, la surabondance de choix est aussi un anxiogène bien réel. Presque autant que sa sœur, la surconsommation. J’avoue que rien ne peut gâcher le fun comme une gorgée de mauvais vin. Je m’imagine déjà dans un salon divinement décoré (la dernière collection de Noël Ikea, ça n’a même pas l’air du plastique !), chez des amis qui invitent pour l’apéro. Les petites saucisses en pâte et les céleris au Cheez Whiz circulent quand tout à coup, quelqu’un recrache en jets son breuvage. Il y en a partout sur la robe de soie H&M d’une convive. Tous les regards se tournent alors vers moi, car c’est ma bouteille que l’on vient d’ouvrir. Moi, qui à défaut d’offrir un centre de table de chez Stokes — comme tout le monde ! —, moi, avec mes principes de simplicité volontaire de cheap, moi qui ai choisi la mauvaise bouteille.
À la lumière de cette réflexion et de ce scénario catastrophe digne de Coppola, je pourrais décider de pelleter un gros tas de neige devant ma porte d’entrée avant de l’enjamber pour rentrer me terrer chez moi pour tout le temps des fêtes. Ou alors, je pourrais demander conseil à mon amie
, amoureuse du vin vivant, de me trouver des bulles élégantes ET respectueuses de l’environnement :Hello Emilie,
Je suis de tout cœur avec toi. Le temps de fêtes peut avoir un goût doux-amer avec la menace des changements climatiques qui plane au-dessus nos têtes.
C’est sûr que tu pourrais t’éviter tout ça en choisissant de rester chez toi à écouter le Bye Bye... Mais t’sais quoi ? Tu pourrais aussi transformer ce mal nécessaire en opportunité, soit celle de répandre ton amour pour les vins d’artisan autour de toi. Parce que t’sais quoi (bis)? Boire vrai, ça ne sauve peut-être pas des arbres, mais… C’est nettement plus intéressant pour la planète de boire une bouteille faite par un artisan, amoureux de sa terre et soucieux de son environnement, que de boire une bouteille faite par des pollueurs.
Je dis ça comme ça, mais de voir la surface du bio qui s’agrandit, de savoir que ça encourage la faune locale, de savoir que ça contribue à réduire l’empreinte carbone, que ça offre un environnement de travail sain pour les viticulteurs, moi ça m’apaise, ne serait-ce qu’un peu.
Donc joyeuses fêtes, bois en paix, et appelle-moi si ça ne va pas. J’essayerai tant bien que mal de te rappeler que là ou y’a de la vigne saine, y’a de l’espoir.
Anna